La grande histoire du Gin

D’aucuns pensent que le gin est une invention anglaise. Que nenni, ce spiritueux a été créé au XVII siècle dans les anciens Pays-Bas et nommé « genever », car il s’agissait d’une eau-de-vie de baies de genièvre. Cet alcool a connu un vif succès en Angleterre jusqu’en 1688, date à laquelle le roi d’Angleterre, Guillaume III, interdit l’importation d’alcools étrangers. Les distillateurs anglais produisent alors chez eux ce que l’on appellera désormais le gin, un alcool bon marché qui va faire des ravages dans la classe ouvrière dont les conditions de vie sont misérables. Le gouvernement tente d’enrayer le problème en surtaxant cette boisson, mais favorise ainsi les distilleries clandestines. Au XIX siècle, les troupes anglaises sont décimées par la malaria dans les Indes. Le remède utilisé était un soda à la quinine, mais son amertume était si intense qu’on la masqua par du gin – origine du célèbre gin tonic.

Le gin séduit aussi outre-Atlantique, mais de 1919 à 1933, la Prohibition interdit la vente d’alcool et voit fleurir les alcools de contrebande consommés clandestinement par les plus fortunés dans les speakeasies ou fabriqués chez soi par les plus pauvres, celui-ci sera nommé « gin de baignoire ». En 1945, l’armée américaine stationne en Europe et a besoin de gin pour ses troupes. Des distilleries françaises emportent les appels d’offres et fournissent les Américains.

Les distilleries de gin foisonnent autour du monde, mais la France est devenue un des principaux producteurs européens. Maisons traditionnelles ou jeunes distillateurs, leur créativité n’a pas de bornes, et cela pour notre plus grand plaisir.

Mais, au fait, c’est quoi le gin ?

La base en est un alcool neutre titrant 96,4°. En principe, on utilise un alcool de céréales ou de mélasse, mais aussi des alcools de betterave ou de raisin, par exemple. Ces derniers réjouissent les papilles des intolérants au gluten !

Cette base neutre est aromatisée avec des baies de genièvre – ingrédient majoritaire du gin –, des graines de coriandre et de la racine d’angélique, mais épices, baies exotiques ou européennes, agrumes, fruits, botaniques diverses sont aussi mis à contribution. L’imagination et le goût prennent le pouvoir pour créer un monde de fragrances et de saveurs.

Après la macération ou l’infusion des ingrédients, l’alcool est ensuite distillé puis dilué avec de l’eau afin d’en abaisser le taux alcoolique, qui doit cependant être d’au moins 37,5° pour mériter l’appellation «gin». Le nom de cette étape est la «réduction». Le gin peut être distillé plusieurs fois, ce qui lui confère alors plus de finesse.

L’aromatisation du gin

L’aromatisation s’effectue selon diverses techniques : infusion, macération, distillation, vieillissement.

L'aromatisation par infusion ou macération

L’infusion est plutôt choisie pour des ingrédients fragiles, tels les pétales de fleurs, qui sont placés dans l’alambic dans un panier au-dessus de l’alcool. Les vapeurs dégagées au cours de la chauffe vont doucement s’imprégner et parfumer le distillat. La macération consiste à laisser pendant un certain temps les botaniques dans un bain d’alcool. Après une éventuelle filtration, le mélange est distillé.

Le vieillissement et les autres techniques

Certains gins sont mis à vieillir dans des fûts de bois. Les essences de ces fûts ainsi que les tanins de vins ou d’eaux-de-vie qu’ils ont pu contenir vont leur apporter de la couleur et des parfums. Une autre technique consiste à ajouter dans une base d’alcool neutre des arômes de gin et des extraits artificiels ou naturels de plantes. Il n’est pas distillé. Le résultat est ce que l’on nomme un « compound gin », un gin de mélange, bas de gamme et peu goûteux… que vous ne trouverez pas ici !

London dry, Old tom, genièvre, sloe gin… Comment s’y retrouver ?

Le juniper ou genever ou genièvre

Le genièvre, que l’on considère comme l’ancêtre du gin, est une eau-de-vie de baies de genièvre obtenue par une double distillation. La base est une distillation de malts d’orge, de seigle, d’avoine… Ce spiritueux reste une spécialité du nord de la France.

Le London dry gin

Le London dry gin n’est pas forcément anglais. En revanche, il s’agit du gin par excellence, et la méthode de son élaboration est stricte. C’est un gin distillé dans lequel les baies de genièvre dominent les autres botaniques qui ont pu infuser ensemble ou séparément ; les arômes sont obtenus lors de la redistillation du mélange. Les adjuvants artificiels sont interdits, seul un ajout très réglementé de sucre est autorisé après la redistillation. Son taux d’alcool à la sortie de l’alambic doit être d’au moins 70° ramené après réduction à 37,5° au minimum. Il ne doit pas être mis à vieillir.

Le distilled gin

Le distilled gin ou gin distillé est issu de la macération ou de l’infusion des botaniques dans un alcool neutre avant d’être redistillé. Le goût de genièvre doit y être prépondérant. Son taux d’alcool est moindre que celui d’un gin non distillé, mais doit être de 37,5° minimum. Il est possible d’y ajouter du sucre, des arômes et des colorants artificiels après la redistillation.

Le Old Tom gin

L’old tom gin doit son appellation à l’old tom, le chat noir qui servait d’enseigne aux bars clandestins au XVIIIe siècle en Angleterre pendant la prohibition. Une fente permettait d’y glisser une pièce et le tenancier, dans le bouge, envoyait par un tuyau une dose de gin de contrebande si mauvais qu’il était abondamment sucré. L’old tom gin actuel est toujours légèrement sucré, mais la pureté et la sophistication de ses ingrédients en font un spiritueux haut de gamme qui séduit par sa rondeur.

Le Yellow gin

Le yellow gin est un gin vieilli pendant quelques mois dans un fût de chêne, ce qui lui procure sa teinte jaune spécifique.

Le Navy strength gin

Le navy strength gin est un gin distillé qui se caractérise par sa teneur élevée en alcool d’environ 57°. Il doit son appellation à la Royal Navy anglaise qui, au XIXe siècle, embarquait des tonneaux de gin à bord de ses bateaux afin de lutter contre le scorbut et le paludisme qui décimaient les navigateurs. Le taux d’alcool permettait de stabiliser sa tenue au cours de la traversée, mais sans doute aussi d’oublier les interminables voyages vers leurs colonies… Le remède contre la malaria était la quinine dont on masquait l’intense amertume avec ce gin.

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